Partie II : L’action
Chapitre préliminaire : le droit d’action
Ce sont les publicistes qui ont travaillé sur la notion d’action en concluant sur le fait que l’action pouvait être définie comme le pouvoir accordé par la loi de s’adresser à la justice pour faire valoir et sanctionner ces droits.
Les privatistes ne sont pas restés en reste et ont étudié cela dans un second temps, ils ont une approche plus concrète en retenant que l’étude de l’action n’a qu’un intérêt c’est de comprendre comment elle est exercée.
Section 1 : Les conditions d’existence l’action
Art 30 qui prévoit, qui définit l’action comme étant le droit pour l’auteur d’une prétention d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge l’adise bien ou mal fondée. Al 2 « Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention. »
Les conditions d’existence sont donc doubles
§1 La nature du droit d’agir
La nature du droit d’agir a fait couler beaucoup d’encre, et beaucoup ont proposé leur théorie. Grâce à ces différentes théories, on va pouvoir classer les différents types d’action que l’on peut exercer.
Au sein du CPC, il y a plusieurs types d’actions que l’on a classifié, grâce à cette classification, on a révélé des régimes d’actions, le régime de l’action dépend de la catégorie à laquelle elle fait partie. Connaitre la catégorie permettre de connaitre automatiquement toutes les règles applicables.
Les auteurs ont révélé deux types de classification
La classification fondée sur la nature du droit litigieux.
Présentation de la classification
Cette classification distingue les actions réelles et les actions personnelles.
L’action réelle est l’action qui tend à la réalisation d’un droit réel. Il s’agit par exemple de l’action en revendication, d’une action en bornage. Toutes les actions qui s’attachent à un droit réel forme une action réelle.
Concernant l’action personnelle, elle est définie comme l’action qui tend à la réalisation d’un droit personnel, c’est-à-dire un droit de créance. Il existe un nombre incalculable de droits personnels, les actions réelles sont beaucoup plus nombreuses que les actions personnelles.
Elles pourraient avoir pour origine une créance contractuelle ou extra contractuelle.
La distinction est importante au regard du régime applicable aux actions personnelles et réelles.
Les principales distinctions entre actions réelles et actions personnelles portent d’une part sur les titulaires du droit d’agir (les parties à l’action) et d’autre part cela concerne la juridiction territorialement compétente.
Concernant les parties :
- L’action réelle est attachée à la chose, elle est exercée in rem, c’est-à-dire par toutes les personnes qui se prétendent titulaires d’un droit sur la chose. Quel que soit ce droit : en tant que jouisseur, propriétaire, possesseur.
- L’action personnelle s’exerce in personam, elle ne peut être exercée que par un créancier à l’encontre de ses débiteurs
Concernant la juridiction :
- En matière d’action réelle, le juge territorialement compétent sera en principe le juge du ressort sera celui du lieu de situation de la chose.
- En matière d’action personnelle, le juge territorialement compétent sera en principe le juge du ressort du lieu où réside le défendeur
Tempéraments
Toutefois il existe une limite, la distinction entre action réelle et personnelle n’est pas parfaite car il y a des actions qui tendent à la réalisation d’un droit personnel et d’un droit réel, on appelle alors ces actions les actions mixtes. Il existe deux types d’actions mixtes, la première hypothèse concerne des actions qui ont pour objet l’exécution d’un acte juridique lequel transfère un droit réel immobilier tout en donnant naissance à un droit de créance. Ex : l’exécution d’un contrat de vente immobilière, l’acheteur est devenu propriétaire, si le vendeur ne délivre pas la chose. On voit apparaitre à la fois un droit réel (titulaire : acheteur qui a le droit à la délivrance de la chose), le vendeur a un droit personnel de se faire payer le prix. C’est une action mixte, si le vendeur ne délivre pas la chose, l’acheteur ne paye pas et vice versa ;
Il y a aussi des actions mixtes dans le cadre des actions relatives à l’anéantissement des actes juridiques translatifs de droits réels immobiliers. Ex : Achat d’appartement, une des parties demande nullité du contrat, action en nullité de l’acte juridique, l’acheteur doit rendre l’appartement, le vendeur doit restituer le prix, à la fois droit réel et droit personnel.
La difficulté des actions mixtes c’est qu’elles ne répondent ni des actions réelles ni des actions personnelles, elles répondent à un régime spécial au cas par cas
Les classifications fondées sur l’objet du droit litigieux
Distinction entre actions mobilières et immobilières
- Actions mobilières : actions portant sur un bien meuble
- Actions immobilières : actions portant sur un bien immeuble
Toutefois, certains biens notamment les fonds de commerce sont qualifiés à la fois de meubles et d’immeubles.
Concernant le régime, des règles procédurales s’appliquent en fonction de l’action, en matière de compétence matérielle, seul le tribunal judiciaire est compétent pour connaitre des actions immobilières. En matière de compétence territoriale, seul le tribunal du lieu de situation de l’immeuble est compétent en matière immobilière.
Distinction entre les actions réelles pétitoires et possessoires
Contrairement à la première distinction, cette deuxième ne concerne que les actions réelles et pas personnelles. Concernant les actions réelles, il est possible de les différencier selon leur objet, action pétitoire et action possessoire.
- Actions pétitoires : actions qui tendent à la sanction d’un droit réel, actions qui visent à protéger un droit de propriété : action en revendication, action ayant pour objet un démembrement de la propriété : action en partage de l’usufruit. Le juge doit déterminer deux choses :
- Si le droit réel existe
- Qui en est le titulaire
- Actions possessoires : elles ont pour fonction de protéger la possession ou la détention d’un immeuble, elles peuvent être exercées indépendamment du caractère certain du titulaire du droit réel sur l’immeuble en cause. On peut exercer l’action même si on est simplement détenteur, si je suis un squatteur, je suis protégée par ce droit et peut le revendiquer devant le juge alors même que je n’ai aucun droit sur la chose. Ces actions réelles possessoires ont une importance factuelle.
Actions possessoires (actions d’urgence) ne sont que temporaires, généralement on répare les choses par des actions pétitoires et des DI, mais on le fait plus tard car les actions pétitoires prennent plus de temps.
En pratique très peu d’actions possessoires sont mise en œuvre car des procédures de référés peuvent indirectement protéger le possesseur et il mobilise cette action en référé pour pouvoir consacrer la situation factuelle avant de pouvoir exercer une action réelle pétitoire.
Mais en réalité i faut bien comprendre que l’action possessoire est différente de l’action en référé
§2 Les caractères du droit d’agir
Concernant le droit d’action, il présente deux caractères
Caractère facultatif
L’exercice d’une action est toujours facultatif, c’est au titulaire du droit d’agir de décider s’il met en œuvre l’action ou pas.
Ce caractère facultatif existe tout au long de l’instance, la mise en œuvre de l’instance’ est facultative mais même quand l’action est en marche, le titulaire peut à tout moment se désister
Caractère libre
La liberté de l’action se traduit par une absence de sanction, une immunité en cas de succombance.
Le succombant qui perd son action ne pourra pas être condamné à des DI sur ce seul prétexte
Certains tempéraments existent, d’une part le succombant est en général condamné à payer les frais irrépétibles et aux dépends, Art 700 et 696, qui prévoit une somme mise à la charge du succombant visant à compenser les frais assumés par le gagnant afin de faire valoir légitimement ses droits.
Les dépends sont des frais dont le tarif n’est pas libre, fixé par la réglementation. (Ex. signification d’un acte par un commissaire = 138 euros. Les frais irrépétibles c’est le reste et notamment les frais d’avocat.
La partie condamnée devra payer au centime près les sommes des dépends, cependant concernant les frais irrépétibles, c’est le juge qui fixe le tarif, c’est un forfait qui est accordé, la technique de l’art 700 permet au juge de dire si l’avocat a fait ou non son travail.
C’est par le mécanisme de l’art 700 que les juges invitent les avocats à passer par les procédures amiables.
Les juges mobilisent plus ou moins cet article 700, selon si l’avocat accepte ou non la procédure amiable.
Deuxième limite : si l’action est jugée abusive, cet abus est caractéristique d’une faute, si cette faute cause un préjudice que ce soit moral ou financier et qu’il y a un lien de causalité, le juge pourra allouer des DI. Action en responsabilité extracontractuelle.
Art 32-1 du CPC qui prévoit un mécanisme d’amende civile dès lors que celui qui agit le fait de manière dilatoire et abusive et pourra être condamné à une amende civile versée au Trésor Public, amende de 10 000 euros max.
Section 2 : Conditions d’ouverture de l’action
Art 31 qui va s’appliquer et qui prévoit deux conditions pour qu’une action en justice soit ouverte à savoir :
- L’intérêt à agir
- La qualité à agir
Ce sont des conditions subjectives. Ces conditions sont subjectives car elles s’apprécient directement ou indirectement selon la personne du plaideur.
Le défaut d’intérêt à agir ou de qualité à agir sera sanctionné par une fin de non-recevoir. Cette fin de non-recevoir à faire déclarer l’action irrecevable.
§1 L’intérêt à agir
Avantage que procure au plaideur la réussite de son action. Un adage particulier existe en la matière « pas d’intérêt, pas d’action ».
L’art 31 indique à ce titre que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention.
L’intérêt à agir doit revêtir 3 caractères pour être efficace.
Né et actuel
Pour que l’action soit recevable, il faut que l’intérêt à agir existe au jour de l’introduction de la demande, à ce titre il est traditionnel d’exiger que l’intérêt soit né et actuel.
Ainsi un intérêt qui serait passé ou éventuel ou futur doit en principe conduire à l’irrecevabilité de l’action.
Il existe deux types d’actions préventives :
- Action interrogatoire : a pour objet de contraindre une personne à déclarer si elle entend user ou non du droit dont elle est titulaire et ce, avant l’expiration d’un délai légal. Ex. le propriétaire a 3 ans pour demander le paiement des loyers impayés, au bout de deux possibilités ans de faire une action interrogatoire vis-à-vis du propriétaire, ce n’est pas possible car pas possible aucun intérêt actuel à soulever cette question
- Action provocatoire ou action en jactance : action qui va être dirigé contre celui qui se prétend titulaire d’un droit afin de le mettre en demeure de justifier ses allégations.
Toutefois, l’intérêt né ou actuel connait des exceptions, des actions très spéciales notamment en matière de brevet d’invention, des actions interrogatoires, provocatoires existent. Notamment en matière de propriété intellectuelle que c’est possible
Des actions conservatoires sont possibles sur le fondement de l’article 835 du CPC, il s’agit d’une action en référé qui vise à figer une situation, à conserver une situation et qui va permettre de rester en l’état avant que ne soit diligenter d’une autre action au fond. Action qui n’a pas en soit d’intérêt actuel et né
Il existe aussi des actions déclaratoires, art 1040 du CPC qui prévoit une action dont l’objet principal est de faire déclarer qu’une personne n’a ou n’a pas la qualité de français.
Légitime
L’Art 31 du CPC prévoit expressément que l’intérêt doit être légitime pour être intérêt à agir.
Le problème c’est que la notion de légitimité n’a jamais été définie.
C’est la JP qui apprécie un caractère plus ou moins légitime, en ce sens on peut retenir que la JP oscille entre la notion de légitimité au sens commun du terme et la notion de légitimité dans un sens plus juridique du terme. Au sens commun, la légitimité renvoie à la raison, renvoie à la morale, dans un sens juridique la légitimité renvoie à la qualité de ce qui est conforme au droit. La légitimité est synonyme de la licéité.
On a eu des évolutions de JP, très longtemps la maitresse d’un homme marié ne pouvait pas demander une réparation de son préjudice causé par la mort accidentelle de son amant. On considérait qu’elle n’avait pas d’intérêt légitime. Jusque dans les années 90, on refusait les compagnons de personnes homosexuels d’agir car on considérait que leur relation n’était pas légitime.
On considère illégitime, l’action du père contre sa descendance pour obtenir une PA lorsque l’un des parents a été condamné pour des atteintes physiques ou sexuels contre cet enfant.
Intérêt Personnel
L’art 31 du CPC ne prévoit pas cette condition ; il est traditionnellement imposé que l’intérêt soit personnel pour qu’il soit efficace, cela implique que la personne qui agit doit pouvoir retirer un bénéfice personnel à l’issue de l’action.
Cette exigence se justifie doublement :
- L’intérêt général ne peut pas être défendu par un seul et unique sujet. L’IG appartient au MP.
- Un adage implique que nul ne plaide par procureur, seule la personne concernée va pouvoir agir. Nul ne peut défendre l’intérêt d’autrui. Ce caractère personnel est parfois interprété de manière singulière au regard de la qualité à agir.
§2 La qualité à agir
C’est le titre juridique, l’habilitation légale qui confère le droit d’agir en justice. Il s’agit d’une condition de recevabilité de l’action résultant de l’art 31 du CPC. Concernant la qualité à agir, elle est en corrélation avec l’intérêt à agir.
La qualité à défendre un intérêt personnel
Selon la doctrine classique, Cornu et Foyer retient une distinction entre les actions banales et les actions attitrées.
Concernant les actions banales, la qualité à agir résulte de l’intérêt à agir. Si on a un intérêt à agir, on a nécessairement une qualité.
Une action en responsabilité extra contractuelle, est une action banale qui sera ouverte à toutes personnes qui a un intérêt né et actuel à agir. Aucune titre juridique / habilitation n’est expressément recherché.
Pour les actions attitrées, ce sont des actions particulières pour lesquelles la loi exige une qualité particulière, spéciale pour agir. Cette qualité ne résulte pas de l’intérêt à agir. Il faut donc un titre particulier, ce type d’action est réservé uniquement à certaine personne que la loi vise expressément.
Ex : La demande en divorce. Seuls les époux peuvent l’exercer.
La qualité à agir à défendre un caractère autre que personnel
Concernant certaines hypothèses, l’action va être confiée à des personnes très particulières afin qu’elles défendent la cause d’un autre. Ici on a une exception au caractère personnel de l’intérêt à agir. La qualité est tellement forte que pas besoin de caractériser l’intérêt à agir.
3 hypothèses vont pouvoir être mis en lumière
La qualité à défendre l’intérêt personnel d’autrui
Le principe, en vertu nul de plaide par procureur, une personne ne peut pas défendre l’intérêt personnel d’autrui, toutefois la loi va pouvoir dans certains cas habiliter précisément et expressément une personne donnée, afin que cette personne exerce une action visant à la défense de l’intérêt personnel d’un autre.
La qualité efface l’intérêt.
- L’action sociale ut singuli : action exercée par un associé au nom et pour le compte de la société. C’est l’action visant à défendre l’intérêt de la personne sociale. Qualité à agir attribuée à l’associé.
- Action des syndicats : ils peuvent parfois agir pour défendre les intérêts d’un salarié, salarié victime de discrimination par exemple. Ils peuvent effectuer une action en justice pour le compte de cette personne.
La qualité à défendre l’intérêt collectif
L’IC n’est pas un IP, en principe lorsque l’action vise à défendre un intérêt collectif, elle n’a pas vocation à être recevable. L’intérêt à agir fait en principe défaut. Par exception, certains sujets de droit disposent d’une qualité particulière, d’une habilitation leur permettant d’exercer une action en défense d’un intérêt collectif.
Tel est le cas des actions diligentées par les associations (associations de défense de la nature) ou les ordres professionnels (ordre des médecins par exemple, on considère que quand on atteint un médecin, c’est tout l’ordre qui est atteint, il peut agir car il a une habilitation pour agir).
La qualité à défendre l’IG
En principe, l’IG appartient au MP toutefois quelques dérogations existent, notamment à l’égard d contribuable qui peut agir sur le fondement du code des collectivités territoriales afin d’exercer des actions qui croit appartenir à la commune et que celle-ci est appelée en délibéré à refuser ou négliger à exercer, action ut singuli. Ex : Municipalité qui n’exerce pas une action contre un contribuable ne payant pas ses impôts.